Marc
(Marc) : Mon ami Serge a acheté un tableau. C’est une toile d’environ un
mètre soixante sur un mètre vingt, peinte en blanc. Le fond est blanc et si on
cligne des yeux, on peut apercevoir de fins liserés blancs transversaux. Mon ami
Serge est un ami depuis longtemps. C’est un garçon qui a bien réussi, il est
médecin dermatologue et il aime l’art. Lundi, je suis allé voir le tableau que
Serge avait acquis samedi mais qu’il convoitait depuis plusieurs mois. Un
tableau blanc, avec des liserés blancs… … …
Cher ?
Pikékou (Serge) : Deux cents
mille.
Marc :
Deux cents mille ?
Pikékou : Handtington me le
reprend à vingt-deux.
Marc :
Qui est-ce ?
Pikékou :
Handtington ?!
Marc : Connais pas.
Pikékou : Handtington !
La galerie Handtington !
Marc :
La galerie Handtington te le reprend à vingt-deux ?...
Pikékou : Non, pas la
galerie. Lui. Handtington lui-même. Pour lui.
Marc :
Et pourquoi ce n’est pas Handtington qui l’a acheté ?
Pikékou : Parce que tous ces
gens ont intérêt à vendre à des particuliers. Il faut que le marché circule.
Marc :
Ouais...
Pikékou : Alors ?
Marc :
Heu...
Pikékou : Tu n’es pas bien,
là. Regarde-le d’ici. Tu aperçois les lignes ?
Marc :
Comment s’appelle le...
Pikékou : Peintre ?
Antrios.
Marc :
Connu ?
Pikékou : Très.
Très !... … …
Marc :
Serge, tu n’as pas acheté ce tableau deux cents mille francs ?
Pikékou : Mais, mon vieux,
c’est le prix. C’est un ANTRIOS !
Marc :
Tu n’as pas acheté ce tableau deux cents mille francs !
Pikékou : J’étais sûr que tu
passerais à côté.
Marc :
Tu as acheté cette merde deux cents mille francs ?!
Pikékou : Mon ami Marc, qui
est un garçon intelligent, garçon que j’estime depuis longtemps, belle
situation, ingénieur dans l’aéronautique, fait partie de ces intellectuels, nouveaux,
qui, non contents d’être ennemis de la modernité en tirent une vanité
incompréhensible. Il y a depuis peu, chez
l’adepte du bon vieux temps, une arrogance vraiment stupéfiante...